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2 juin 2010 3 02 /06 /juin /2010 13:20

sirene    Pas d’erreur, il s’agit bien d’UN sirène !

 


Le musée zoologique de Strasbourg était devenu vieillot, peu fréquenté et menacé deMusée Zoologique Strasbourg disparition. Il était composé du rachat en 1804 des collections d’histoire naturelle de Jean Hermann, médecin et naturaliste et une reconstitution à l’identique de son cabinet recréait un musée de musée.

Pour faire perdurer le souvenir avant le démantèlement, un recueil de souvenirs a été constitué. Chantal Robillard, trouvant qu’il était monstrueux de tuer un musée, décida d’y introduire un monstre.

Oberlin Homme sirène

 L’idée du sirène lui était venue après une visite au musée Oberlin de Waldersbach qui conserve des fiches pédagogiques dont celle d’un sirène. Le pasteur Oberlin après la révolution avait décidé d’éduquer les enfants, par les leçons de choses et les constitutions d’herbiers, de coquillages et de toutes sortes de collections, accompagnés de fiches pédagogiques.

Cependant, il avait glissé quelques faux afin d’aiguiser l’esprit critique des enfants. On lit très bien sur la fiche le texte qui l’accompagne : « Il fut vu à Paris en 1757. (     ) »

Ces fiches  sont extraordinaires: link

Chantal Robillard fit donc rencontrer dans le musée le sirène, animal inventé,  et une licorne dont on ne sait pas si elle est véritablement là ou pas. Une chimère.

Dans le musée, le juke-box existe et permet d’écouter des chants d’oiseaux. Les seuls animaux vivants sont les pyranhas. Le linguiste est bien sûr Claude Hagège, l’éthologue toulonnais Boris Cyrulnik, le psychanalyste viennois Freud, l’eau minérale bicarbonnée, légèrement pétillante l’eau de Vichy et la vétérinaire la propre fille de l’auteure .

Le Sirène et la Licorne.

 Le donateur partit en faisant craquer bruyamment le parquet ciré du long couloir. La conservatrice regarda, un peu hébétée, la porte restée ouverte. Puis se retourna vers l'étrange bête qui s'agitait dans son immense bocal, poussait des cris, éclaboussait le plancher. Qu'allait-on faire de ce monstre ?

Le donateur avait été très ferme : attention, il réclame des soins tant qu'il est vivant, et il attire. Ne vous laissez pas faire, prenez votre mal en patience et souvenez-vous que c'est une vieille carne, qui crèvera bientôt.

Pour l'heure il fallait mettre la nouvelle acquisition en lieu sûr, la soustraire au regard du public. Et l'examiner autant que faire se pourrait. On l'installa au sous-sol, près des laboratoires des chercheurs, des bureaux du taxidermiste. On fit venir la vétérinaire.

La bête, hurlant comme un goret, refusa de se laisser inspecter. Elle plongea au fond de sa grande cuve en verre et s'escamota sous des couches de vase nauséabonde un si long temps qu'on la crut morte.

Quand elle reparut, tout ce qu'on put faire fut de prélever un poil de sa barbe verte, un cheveu roux de sa tonsure, une écaille de sa nageoire caudale. Trois laboratoires indépendants, outre celui du musée, rendirent le même verdict : mi- chair mi- poisson, certes, mais de même ADN. Ni montage, ni trucage apparent, contrairement au dinosaure rapporté à grands frais de Mongolie intérieure : celui-là s'était révélé constitué des squelettes de quatre sortes d'animaux. Et de différentes ères préhistoriques! Prudents, les scientifiques du musée décidèrent de se contenter, tant qu'elle vivrait, d'observer la bête, pour témoigner ensuite.

Les premiers cris d'effroi passés, ladite bête se mit à jouer des mains et parler, monologuant dans une langue française fort correcte, aux tournures, modulations et prononciations fleurant bon le dix-septième siècle. Du Perrault, mâtiné d'Aulnoy et de Sévigné. D'ailleurs, l'animal récitait par cœur La Fontaine, déclamant à l'envi « le lièvre et les grenouilles », qu'il semblait affectionner.

La conservatrice et la vétérinaire en avaient pourtant vu d'autres, en matière de monstruosité. Y compris dans les manuscrits médiévaux et incunables des bibliothèques de la région, où abondaient moutons à trois têtes, loups garous, ardents et autres hypogriffes. Le roi de rats conservé en bocal au second étage figurait d'ailleurs parmi les unica, dont le Musée zoologique s'enorgueillissait à juste titre.

Cela les embarrassait donc beaucoup : une bête qui se gratte le poitrail, fait des marionnettes et des pieds de nez, passe encore, mais qui parle ? Cela accentuait de façon gênante le côté humanoïde du monstre. On appela un éminent linguiste cévenol, qui, après avoir prêté serment de ne rien révéler, confirma l' authenticité de la langue de la bête humaine: du pur grand siècle. L'universitaire fit cependant remarquer que des automates pouvaient reproduire la voix humaine, et qu'un bon programme informatique chargé dans le logiciel de …

Lui coupant la parole, la bête alors chanta. Finies, les logorrhées récitatives. Elle entonna, d'une voix de basse veloutée, chansons anciennes, messes, paillardes, comptines enfantines. On n'arrivait plus à la faire taire ! Le personnel accourait, négligeant la surveillance des salles. Quelques visiteurs finirent par entendre de loin ce chant et vinrent s'agglutiner devant la porte de service, heureusement blindée et fermée à triple tour. On leur expliqua qu'un stagiaire québécois répétait là son prochain oral du Conservatoire, tout en effectuant le nettoyage saisonnier des ours polaires et des morses.

En quelques jours, un public de plus en plus nombreux revint écouter le chanteur inconnu. Le musée connut alors une affluence sans pareil, le bouche à oreille fonctionnant à merveille. Des habitués, débarqués par le premier tram, patientaient désormais dès l'aube devant l'entrée du musée ; on vit bientôt des vendeurs de mauricettes à la sauvette succéder aux vendeurs de beignets huilés sur le boulevard et dans les rues entourant le musée ; l'après-midi, les vendeurs de barbe à papa et de glaces prenaient le relais. Un compositeur connu, en route pour la répétition de sa prochaine création mondiale pour Musica, s'arrêta pour écouter : « belle voix, futur professionnel », dit-il à la conservatrice, qui n'osa révéler de qui il s'agissait. « Envoyez-moi ce jeune gars, je le présenterai à la chorale Accentus. On manque de bonnes basses, en France ».

Comment continuer à taire un tel événement ? D'autant que le musée avait soudain des notes de frais en poisson cru dépassant déjà la consommation quinquennale de la cantine du personnel et des piranhas de l'aquarium. La conservatrice, déchirée, n'osait remettre la créature à un parc animalier, où pourtant elle eût été mieux, mais alors à tout jamais perdue pour la science. Le donateur avait d'ailleurs insisté sur le fait qu'il l'avait tirée d'une ménagerie, où elle n'était pas heureuse, que pour cela même il voulait en faire don à ce musée, qui le saurait conserver.

On le monta de nuit, en toute discrétion, au grenier, dans les réserves. On lui aménagea un bon gîte derrière les rayonnages compactus abritant quelques millions de papillons épinglés. Tout là-haut, on ne l'entendrait peut-être plus ? Il fallut passer d'abord par la réserve aux grands animaux : gorilles, girafes, grizzlis…

Là, il l'aperçut, qui se tenait, toute blanche, dans un coin sombre, sa longue corne pointant de derrière le vieux juke box à chants d'oiseaux.

Il tomba en mélancolie. Ne s'alimenta plus. N'accepta ni la thérapie souriante d'un éthologue toulonnais, ni celle, taiseuse, d'un psychanalyste viennois. Evita les seringues de sérum physiologique de la vétérinaire. Dédaigna les saumoneaux des sources de l'Allier, que le linguiste lui faisait porter vifs. Rejeta l'eau minérale, bicarbonatée et légèrement pétillante, qu'on tentait de rajouter dans son bain verdâtre pour le sustenter. Ne chanta ni ne récita plus jamais. Ne parla, ne cria. Se languit.

Etait-elle empaillée ? Vivante ? Imaginaire ? L'esprit embrumé, il rêvait à la fugitive vision. Il ne fit rien d'autre, jusqu'à sa mort à quelques temps de là, que d'y songer.

« Car que faire en un gîte à moins que l'on ne songe ? »

Voir mes autres billets:

 La fontaine aux fées. Chantal Robillard.   Redonde au gamin têtu. Chantal Robillard. 

Les sept fins de Blanche-Neige. Chantal Robillard

 

blogs de Chantal Robillard

Blog sur les lectures et lectures-concerts :  http://dessagnesetrobillard.creation-partagee.over-blog.com/

Sur Venise : http://chantalrobillard.over-blog.com/

Sur le Maroc : http://maroc-poemes-de-voyage.over-blog.com/

Bio et bliographie de Chantal Robillard

http://www.m-e-l.fr/Chantal%20Robillard,463

Chantal Robillard intervient dans les écoles à votre demande . La contacter par le lien ci-dessus

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1 juin 2010 2 01 /06 /juin /2010 19:05

 

 

 A découvrir pour tout amoureux de la langue et des mots !

Une joaillière dont il faut apprécier le choix des gemmes, couleur, éclat, forme, rapprochements, taille !

 

Dans le cadre de nos rencontres littéraires Liber’thé, Chantal Robillard nous a fait l’amitié de nous parler de son recueil de contes: La fontaine aux fées. Au fil des heures, elle nous a tenus en haleine en nous faisant partager son processus créatif, ses différentes œuvres et son enthousiasme pour la langue et ses subtilités, sa passion pour les mots, les histoires, les dits et non-dits, les clefs cachées dans les écrits. Elle a lu des passages de ce recueil, des Sept fins de Blanche-neige et de Hôpital Cendrillon, et si elle revendique le travail du conte écrit, elle rajoute également le talent du conteur de tradition orale.


Ecrivain et poète, elle fait également partie de la liste OULIPO [1].

Elle est conservateur en chef des bibliothèques pour le livre et la lecture à la Direction des affaires culturelles (DRAC) de Provence Alpes Côte d'Azur.Elle tient depuis 1998 la rubrique « littérature jeunesse à contraintes » dans la revue Formules.

Membre de la Société des gens de lettres  (SGDL), elle est également jurée de prix littéraires, notamment le prix Printemps du roman qu'elle a fondé en 1997 avec Jean-Jacques Brochier et Danièle Brison, et dont elle a été la présidente en 2008.

Chantal Robillard a été nommée Officier des Arts et Lettres en juillet 2008.

 

   Chantal Robillard

 

 

 

 

Merci Madame pour votre talent

et votre générosité.

 

 

 

 

 

 

 

 

« Le conte est un genre un peu méprisé, un peu méconnu, alors que ses bases en sont mondiales et universelles. Les mythes, légendes et contes ont existé de tous temps, dans toutes les civilisations.

Je propose ainsi de revisiter les contes, de changer d’époque, de lieu, d’amplifier, de braquer le projecteur sur un personnage secondaire ou de m’imposer une contrainte. Le choix d’une contrainte peut donner de belles choses ! »

 

 


LafontaineauxfeesLe Verger éditeur, mars 1999.

 

La fontaine aux fées est un recueil de 12 contes à croquer

qui regroupe ces différents aspects de l’écriture

ainsi que leur intratextualité (textes liés les uns aux autres).


 

Tout part de l’introduction : Le thé des fées: prélude. Le premier conte regroupe des fées de différentes époques qui utilisent maintenant fax et portables: Mélusine, Poppins, Clochette, Lilas (petit clin d’œil au film de Jacques Demy: Peau d’âne ; la fée parle avec la voix de Delphine Seyrig), Bleue (la jolie fée bleue de Pinocchio), Carabosse, Sirène. Puis, on retrouvera l’une d’entre elles dans chaque conte.



Dans l’un des contes de Perrault, une fée demande de l’eau à deux sœurs. L’une (ravissante, douce et bonne) lui en donne et elle est pourvue d’un don merveilleux, dès qu’elle ouvre la bouche, il en sort de roses, des perles et des diamants. Elle rencontre un Prince qui l’épouse. L’autre (laide, revêche et égoïste) refuse et elle se retrouve condamnée à cracher des serpents et des crapauds. Chassée de toutes part, elle ne bénéficie d’aucune rédemption et c’est le seul conte qui finisse mal. Le conte se termine sur ces mots terribles: elle alla mourir au coin d’un bois.

Disparition au coin d’un bois: belle absente est la traduction de ce conte.

Il fallait ainsi qu’allât mimi-pinson au puits, matin puis soir, fort loin du logis, puis rapportât un grand pot d’acqua. Un jour, ayant pris boisson au puits, soudain vint la fatma-sans-un-sou, qui la manda pour lui offrir un drink. « Oui-da, ma grand-maman », dit joli minois, qui, rinçant aussitôt son pot, puisa au plus profond du puits, lui tint alors son pot afin qu’old clodo bût sans tracas. La fatma, ayant bu, lui dit : « tu as un air si bon, si mignon, si droit, qu’il faut, pour moi, t’offrir un don.


 

La seconde chance raconte la suite de l’histoire de la méchante sœur.

Une fée la prend en pitié, la ressuscite. Pas si bête, la jeune fille saisit sa chance, se tait, épouse un paysan, apprend à utiliser son don à bon escient, devient bonne, aimante et obligatoirement toujours taiseuse.

Elle remercia la fée de sa même révérence profonde. A son grand étonnement, elle entendit alors la voix de celle-ci :

- Merci Fanchon, tu me récompenses de mes efforts. Je t’offre un dernier don : je serai la marraine de l’enfant que tu portes en toi et, je te le dis, ce sera un homme de parole. 


 

La belle est au jardin d’amour raconte la suite du traditionnel « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ». La paysanne devenue princesse n’eût guère de succès auprès du prince et de la cour. Hormis les diamants et fleurs, elle avait peu de conversation !

Et, comme l’on s’habitue à tout, très vite, même ses perles, ses roses et ses diamants parurent, à quelques temps du mariage, plutôt communs. (      ) Etaient alors apparues sous une lumière crue toutes les maladresses de la jeune reine, à qui l’on avait point encore eu le temps d’apprendre à discourir, à danser, à faire les mille civilités de la vie de cour, le prince l’ayant épousée le jour même de son arrivée au palais.

Mal aimée de sa belle-mère, moquée par la cour, mère éplorée perdant les garçons mis au monde, elle fut vite délaissée par son époux, exilée et recluse dans un château puis assassinée pour lui voler sa richesse.

Les deux battants de la porte s’ouvrirent avec violence. Elle n’eût pas le temps de comprendre. La première flèche lui pénétra le sein gauche, la seconde, presque simultanément, se planta au milieu de son front. Les archers s’effacèrent devant le chevalier brigand, qui vint se pencher au-dessus du corps. Avec son poignard, il lui ouvrit la gorge d’une oreille à l’autre, puis fendit le corps du cou au bas-ventre, et fouilla dans les entrailles chaudes.

- Alors ? dit un comparse avide.

- Rien ! Rien de rien !... On nous aura menti… Cette sorcière n’avait rien de précieux dans le ventre !

 

 

Autre variante de la suite de « Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants », tout aussi tragique : La Vierge noire. Dans cette version, la malheureuse choisit de s’isoler dans un couvent et comme sa sœur de se taire. Jusqu’au jour où le flot de paroles endigué se répandit et l ‘ensevelit.

On se pressa de remuer, vite, vite, le monceau de perles, de pierres, de roses. On se piqua au sang avec les épines des fleurs d’églantier, on se zébra les mains avec les éclats de diamants, on glissa sur les perles qui fuyaient vers la rivière… Mais quand tout fut éparpillé, dispersé, épandu au sol, on ne la retrouva pas.

 

 

Fabliau de la fontaine aux fées en forêt de Foucheresse est un tautogramme dans lequel tous les mots pertinents commencent par un « f ». Pour celui-ci, Madame Robillard a été aidée,  dit-elle, par messieurs Robert, Larousse et Quillet ! Mais il ne suffit pas de faire appel aux dictionnaires, encore faut-il recourir aux éléments essentiels à une nouvelle : histoire, suspense, chute.

La faridondaine, la faridondon. Folâtre, Fanchon fredonnait en furetant dans les fourrés, flemmassant vers la fontaine aux fées, flanquée d’un flacon de faïence un peu fêle. En fanfreluches de flanelle framboise et fichu fleuri, elle flânait, fort loin en forêt. Il lui faudrait foncer, pour figurer fièrement à la foire, sous les flonflons de la fête foraine.

 

Le désempaillé fait référence à la fontaine du Pérou de St Alyre en Auvergne. http://www.clermont-ferrand.fr/La-fontaine-petrifiante-des.html , site exceptionnel où depuis le 17ème siècle on pétrifie des objets. L’eau chargée les recouvre peu à peu d’une gangue translucide. L’auteur se souvient avoir ainsi vu toute une ménagerie pétrifiée.

 

Romance en mer sereine: contrainte du prisonnier est vu par Vénus. Cette fois, la contrainte est de n’utiliser aucune lettre de l’alphabet possédant hampes ou jambages, c’est à dire la moitié de l’alphabet.

Ecume nacrée en mer sereine, mer miroir, cosmos noir comme raisin, avec mimosa semé en ses recoins, vénus, oisive, examine un vaisseau.

 

 

Voir mes autres billets: Le sirène et la licorne. Chantal Robillard.   

Redonde au gamin têtu. Chantal Robillard.

Les sept fins de Blanche-Neige. Chantal Robillard

 

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Sur Venise : http://chantalrobillard.over-blog.com/

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Bio et bliographie de Chantal Robillard

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Chantal Robillard intervient dans les écoles à votre demande . La contacter par le lien ci-dessus

 


[1] OULIPO : Ouvroir de littérature potentielle, créé en 1960 par Le Lionnais, Queneau et une dizaine d’autres. Un écrivain oulipien s’invente des contraintes d’écriture. C'est "un rat qui construit lui-même le labyrinthe dont il se propose de sortir". Un labyrinthe de quoi? De mots, de sons, de phrases, de paragraphes, de chapitres, de livres, de bibliothèques, de prose, de poésie, de tout ça...

Plus d’infos : link

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30 avril 2010 5 30 /04 /avril /2010 14:53

 

Camus. affiche       La cité des allumettes

 

 

Visite passionnante de l'exposition Il y a cinquante ans Albert Camus , à la Cité du livre, à Aix-en-Provence, commentée par la directrice Madame Mahasela. Elle présente des documents originaux provenant des archives de l'auteur disparu brutalement le 4 janvier 1960, il y a 50 ans.

Camus. centre de documentation

 

Le 14 avril 2000, Catherine Camus, fille d'Albert Camus et  la ville d'Aix-en-Provence signent une convention de dépôt de ces archives.
Le Centre de documentation Albert Camus accueille un dépôt riche de plus de 220 cartons d’archives et 1500 imprimés sur sa vie, son oeuvre, son itinéraire intellectuel, etc...

"J'aime bien l'idée que mon père soit en Méditerranée". 



Camus. reproduction stèle Pipasa 

Ces archives sont parfois présentées au grand public, lors d'expositions exceptionnelles, ou disponibles pour les chercheurs.

- Moulage de la stèle érigée à Tipasa (Algérie). "Je comprends ici ce qu'on appelle gloire, le droit d'aimer sans mesure. " Camus.    Noces à Tipasa. Albert Camus.

- Témoignages nombreux et émouvants de personnalités à l'annonce de sa mort. "Il m'avait appris comme à tant d'autres l'honneur d'être homme." Roger Quilliot 

- Hommage des ouvriers du livre. "Il donnait l'impression d'être un travailleur comme nous et nous le traitions comme tel."

- Textes publiés dans l'Express, dans Combat, dans différents journaux algériens, dans la Revue de la table ronde.

- Correspondance avec Gallimard, Char, ...

- Témoignages sur son parcours d'intellectuels: Sartre, Char, Grenier, Daniel, Simone Weil (la philosophe).

Camus 

Deux enseignements.

1/ Ce qui m'a frappée lors de cette visite, c'est l'importance de Camus sur la pensée et la vie intellectuelle et politique de son époque. Tous, en accord ou pas, se sont positionnés par rapport à lui, par rapport à sa pensée d'homme debout, n'hésitant pas à parler, au risque de déplaire, jusqu'à l'ostracisme et le rejet, sans compromissions. 


2/ Par ailleurs, j'ai enfin compris qu'il fallait envisager la littérature camusienne comme  un parcours , une oeuvre en évolution.

Trois époques dans ce parcours: l'absurde, la révolte et l'amour.

Pour chaque époque, trois traitements différents: philosophique, théâtral et romanesque.

Cet éclairage permet d'appréhender la lecture de ses livres sous un aspect plus enrichissant, permet de comprendre pourquoi c'est l'auteur le plus traduit (65 langues différentes) et permet de comprendre l'obtention du prix Nobel.


 le premier homme Camus   Le premier homme, Gallimard, avril 1994.

 Ce livre est le manuscrit inachevé retrouvé après la mort de Camus. En 1957, il avait obtenu le prix Nobel de littérature , à l'âge de 46 ans. Il avait ensuite eu du mal à redémarrer après cette prestigieuse récompense.  Le premier homme prouve le renouveau de son inspiration. Il avait surmonté cette difficulté et entamait un nouveau cycle consacré à l'amour. Il avait affirmé se sentir enfin libre après avoir fini les deux cycles de l'absurde et la révolte et souhaitait écrire une grande fresque à la "Roger Martin du Gard" qu'il admirait. Il expliquait qu'après avoir incarné des mythes (cf. Caligula), il allait enfin écrire ce qu'il voulait.

Ce livre incomplet, émouvant, est autobiographique. L'écriture témoigne d'un renouveau total. Après "l'écriture blanche" camusienne, qui fait croire à tort qu'il est un auteur facile à lire, cette écriture est chaleureuse, personnelle. 

Au delà de la polémique, ce livre est un témoignage bouleversant sur un écrivain accompli, dont la mort prématurée a mis fin à une inspiration renouvelée.


Dernière phrase du manuscrit:

[...] lui, comme une lame solitaire et toujours vibrante destinée à être brisée d'un coup et à jamais, une pure passion de vivre affrontée à une mort totale, sentait aujourd'hui la vie, la jeunesse, les êtres lui échapper, sans pouvoir les sauver en rien, et abandonné seulement à l'espoir aveugle que cette force obscure qui pendant tant d'années l'avait soulevé au-dessus des jours, nourri sans mesure, égale aux plus dures des circonstances, lui fournirait aussi, et de la même générosité inlassable qu'elle lui avait donné ses raisons de vivre, des raisons de vieillir et de mourir sans révolte.

 

 

 La chute. Albert Camus

Noces à Tipasa. Albert Camus.

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24 avril 2010 6 24 /04 /avril /2010 10:03

    

 

       varie 2737    Le Tombeau d'Achille    

              


 Le Prix des Écrivains du Sud 2010 

a été attribué à 

Vincent Delecroix 

pour

Tombeau d'Achille

  

Gallimard. Octobre 2008

 


 

 

 

 

 

 Petit bijou littéraire. Entre essai et autobiographie, l’auteur évoque Achille, le modèle de son enfance et développe une réflexion sur les héros de l’enfance qui nous aident à devenir adultes. Achille, le héros mythique de l’Iliade - le plus fort, le plus rapide, le plus beau- est aussi celui qui choisit une vie brève et intense, la mort plutôt que le retour... Plein d’humour mais aussi de mélancolie, l'auteur fait revivre le petit garçon ébloui par ses aventures.

Grand prix de littérature de l'Académie Française.

Vincent Delecroix est diplômé de l'Ecole Normale Supérieure d'Ulm, de Sciences-po Paris, docteur agrégé en philosophie, Maître de conférences à l'Ecole pratique des Hautes Etudes (Sorbonne). Ancien pensionnaire de la villa Médicis.

 

Autres publications:

2003:  Retour à Bruxelles (récit).

La preuve de l'existence de Dieu (nouvelles).

2004: A la porte (roman). Adaptation au théâtre en 2007, couronnée de 2 Molière.

2006: Ce qui est perdu (roman). Prix Valery Larbaud.

2007: La chaussure sur le toit (roman).




link : Critique du Magazine littéraire

link : Critique de Télérama

 

Extrait:

«Il était votre héros, peut-être, parce qu'il était le plus grand des héros, le plus beau, le plus fort, le plus courageux ou le plus inflexible. Ou parce qu'il avait un ami, un vrai, à la vie à la mort. Il était votre héros, parce qu'il fut inconsolable et que sa mère caressa tendrement ses cheveux (vous aviez faim de cette caresse, et honte de cette faim, qui n'était pas virile). Parce que, aussi, il faut bien l'avouer, il était de tempérament colérique et que vos caprices de gamin en étaient blasonnés d'or, ou que son orgueil était une qualité divine et non un vilain défaut. Parce qu'il n'était pas chafouin comme Ulysse, pontifiant comme Nestor, stupide comme Agamemnon, lâche comme Pâris - et surtout pas cocufié comme Ménélas. Parce qu'il était pur, dans sa violence comme dans sa magnanimité, dans son chagrin comme dans sa joie triomphante. Et il semblait qu'à le suivre vous étiez purifié, plongé au feu, comme lui-même le fut, enfant, par sa mère. Vous n'alliez jamais vieillir.

Vous n'alliez jamais vieillir.

Vous vieillissez.»



PRIX DES ÉCRIVAINS DU SUD

Aux journées des Ecrivains du Sud, pendant 20 minutes , sur le thème imparti, chaque auteur développe son propre style: une improvisation, un mode léger, un sombre récit, ... 

Ecoutez l'interview de Michel Déon au sujet des journées  en cliquant sur ce lien: link 

 

Présidente du jury 

Sylvie Durbet-Giono

Membres du jury

Paule Constant, Michel Déon, Michèle Gazier, Christine Jordis, Robert Kopp, Gilles Lapouge, Pierre Lepape.

Règlement

Le prix littéraire des Écrivains du Sud récompense un auteur à l’occasion de la publication d’une œuvre de langue française remarquable pour sa mise en valeur de la littérature, quels que soient le genre et la forme de cette œuvre: roman, poésies, théâtre, essai, dialogues, récit, BD, biographie, thèse, nouvelles, miscellanées, lettres, tableaux, documentaire, contes, soties, mémoires, chroniques, carnet, dictionnaire, souvenirs...  


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Jurée du prix des lecteurs des Ecrivains du Sud.
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